Écrit par Kelly Norah Drukker, poète de la scène émergente anglophone de Montréal, ce très beau recueil témoigne des pérégrinations de l’auteure à travers des territoires éloignés, que la poète parcourt à travers le texte tout en y relayant une expérience très sensible du monde, et son propre rapport aux lieux confidentiels. Que ce soit en déambulant à travers Inis Mor, une petite île de langue irlandaise sise sur la côte ouest galloise, ou par les paysages de la campagne française – dont Drukker nous fait découvrir la beauté un peu paradoxale des Pyréneées – l’auteure y déploie une voix à la fois tendre et acérée, donnant à entendre les gens simples comme les marginaux, se fondant en ces contrées, qu’elle épouse de manière à se marier presque à leurs confins, à sentir battre leur pouls.
Un recueil magnifiquement traduit par Lori Saint-Martin et Paul Gagné, qui, après avoir traduit 100 romans, se sont attaqués pour la première fois à la poésie, nous offrant ici une version française admirable, en tout point fidèle au recueil original, à sa beauté aride, et à son rayonnement infini.
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Quand souffle le vent
Naufrage salin d’œillets marins
plaqués au sol en pierre calcaire ;
récurée par le vent, ratissée par le vent,
dos ployé, l’aubépine.
Les clochettes du fuchsia se balancent et sonnent,
frisson dans le bosquet d’ormes blancs,
frottement des ronces : des doigts râpeux
frôlent un mur de pierre —
l’euphraise s’accroche
au sol amer.