Rappelant que tout discours social situe l’intervenant dans une construction intellectuelle signifiante qui relève d’un univers symbolique dont il n’est pas complètement le maître, François Ouellet démontre, d’abord à travers les faits historiques, comment le Québec s’inscrit traditionnellement dans une posture aliénante vis-à-vis les figures du pouvoir et de l’autorité, qu’ont pu incarner aussi bien la couronne britannique, le discours ultramontain que la politique de Pierre E. Trudeau. Puis, s’intéressant aux textes littéraires, il fait voir comment la littérature québécoise, depuis les origines, s’écrit du « point de vue du fils », il montre de quelle façon obstinée et désespérée elle rend compte, à travers personnages et événements, d’une volonté sans cesse brisée d’accéder à la paternité symbolique.
Dans cette perspective, il apparaît que l’indépendance politique et une réforme inédite de la société québécoise placée sous le signe du Père, vu comme formateur du lien social et du rapport au sacré, soient les préalables essentiels pour que le Québec accède à la pleine maturité. Entre l’autorité abusive du duplessisme et l’absence postmoderne d’autorité, le Québec trouverait peut-être enfin un sain équilibre… « Passer au rang de Père », c’est-à-dire quitter la posture inconfortable du fils pour prendre en charge son propre destin sociohistorique.