Professeur à la retraite, Louis Gouru rêve de changer de vie. Amoureux des lettres, déterminé à entreprendre une nouvelle carrière, il se lance dans l’édition avec l’enthousiasme du néophyte. Il ignore encore tout de la maladie qui l’affecte.
François Trottier, de son côté, pratique la médecine depuis quarante ans. À lui aussi, l’âge donne des ailes et de l’ambition. Son goût prononcé pour les femmes le conduit à mettre au point une thérapie inédite et controversée.
L’irruption d’une jeune femme de trente ans, à la beauté troublante, servira de catalyseur à ces projets tardifs. Malgré ses propres blessures, Natacha devra trouver la force de soutenir ses deux amis et de contrer les périls qui s’annoncent.
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Le froid, les peurs battirent en retraite. Louis retrouva son calme et sa sérénité. La beauté du monde, aperçue tout à l’heure, ne l’avait pas encore abandonné. Il eut pourtant, à cet instant précis, pas très loin du sommet du mont Royal, l’intuition de vivre le dernier moment parfait de son existence terrestre. Les images de Monet et de Renoir, les gestes tendres de Natacha, la complicité de son ami François, les bruissements de la forêt, les tout derniers éclats de lumière, un repos complet du corps, une sensibilité extrême de l’esprit, tout, à l’intérieur et à l’extérieur de lui, concourait à ce sentiment de plénitude. Des souvenirs anciens remontaient de l’enfance, sélectionnés ou trafiqués par une main bienveillante, des scènes de paix et de réconciliation. Le bonheur est éphémère, il ne faut pas le rater. Conscient de la fragilité et de la fluidité des êtres, saisi par l’émotion, soulevé par elle, Louis vivait une sorte d’extase. S’il avait pu, il aurait conclu là, brutalement, d’un mouvement de tête ou d’un clignement des paupières.